dimanche 24 juin 2007

Berlin


C’est pas parce que tous les autres applaudissent que ça va m’empêcher de faire ma tête de con. Hier soir, j’étais au Palais des Congrès de Paris pour une représentation de Berlin par Lou Reed et je ne pouvais pas manquer ça. Vrai four commercial à sa sortie en 1973, Berlin est le vrai chef d’œuvre post-Velvet de l’Américain, bien loin devant Transformer, habile formatage glam-rock de la décadence new-yorkaise. Berlin fait partie des disques qui racontent des histoires, où les chansons s’enchaînent avec sens et limpidité. L’histoire est triste, déconstruction glaciale d’un couple qui culmine avec « Sad Song » et pas loin avant « The Kids » et ses vrais pleurs d’enfant (le producteur Bob Ezrin aurait enregistré ses vrais enfants en train de pleurer l’absence, provoquée, de leur mère).

Pour reproduire en intégralité Berlin et ses arrangements baroques, Lou Reed a de bons accompagnateurs : le guitariste Steve Hunter (qui jouait sur le disque), le contrebassiste Rob Wasserman, un chœur de dix jeunes filles, des cordes, des cuivres, un batteur compétent (Tony Thunder Smith). Bon, il a aussi la mauvaise idée de ramener Fernando Saunders, bassiste qui se prend pour un chanteur à qui on devrait réserver le même sort que le barde d’Astérix.
Le seul problème vient de Lou Reed lui-même. Il est incapable de chanter ses propres chansons sans modifier les accentuations, le rythme des phrases, la dramaturgie générale de classiques. Donc, oui, je lui reproche de changer parce qu’il n’ajoute rien. On croirait avoir affaire à un prof d’art new-yorkais en train de faire un master class… Hier, je n’ai jamais éprouvé de grand frisson alors que rien qu’en réécoutant Berlin le disque, je suis dans tous mes états. [Si vous regardez le DVD du Velvet Underground reformé en 1993, c’est évident : le maillon faible c’est Lou Reed, insupportable, autosuffisant, complaisant].
Apparemment, cette incapacité à chanter juste (car le bougre chante mal de son ton théâtral) n’a gêné personne. Nous vivions une célébration, qu’importe que les solos soient longs, que Lou Reed plaque des accords inutiles, massacre « Oh Jim » transformé en un truc pseudo-funky…
Au rappel, « Sweet Jane », « Satellite Of Love » et « Walk On The Wild Side », mini best of pour les gogos. Niveau musique, c’était plutôt beau mais, à quoi bon avoir juste une belle coquille ?


Ultime précision : j'adorerais avoir pleuré de joie, je serais allé lui baiser les pieds s'il avait été grandiose, à la hauteur de son talent passé. Mais ça n'a pas été.

2 commentaires:

Li-An a dit…

Comme j'ai très mauvais goût (je peux être très bas du front quand je veux), j'adore Transformer. Berlin, je dois l'avoir sur une vieille cassette toute pourrie. Faudrait que je la ressorte histoire de faire croire que je sais de quoi on parle.

Vincent Brunner a dit…

Hop hop hop, ne me fais pas dire ce que je n'ai pas pensé : Transformer, c'est cool, les arrangements de Bowie, les mélodies, la voix impec' et un peu dégoutée de Lou Reed. Mais Berlin, à côté, c'est carrément le long métrage.